© Christian Benedetti, archives personnelles

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Edward BOND

Auteur associé au Théâtre-Studio depuis 1997

Edward nous a quittéS le 3 mars 2024. ToutE l’équipe du Théâtre-Studio se joint à CHRISTIAN Benedetti pour dire sa peine et sa tristesse infinie.

SAUVÉS…

il était devenu le parrain du Théâtre-Studio, lieu qu’il aimait tant et où nous avons tellement travaillé ensemble. Le silence s’abat sur nous.

Le dernier poème qu’il a envoyé à christian :

2024

In the pitch-black night

The unseen snow storm fell

In the morning the flat roof

White as an unmarked sheet of paper

Frost hard as ice and sharp as knives to chip beaks and claws

The robins wait on the leafless tree

They see bits of me in the glass

I open the window

I throw the day’s handfuls of seeds mixed corn hearts from sunflower-heads broken bread

If we had attacked Hitler two years before he started his war

Would it have been otherwise?

The robins fly down

As they stand and eat their wings still seemed to fly

Child as you grow older remember

Distinctions commendations honours citations

Are less than the joy in the fed heart under the red breast

Two years before he started his war

I do not know

If you ride a bike through a busy market you pass all the crises and problems needed to found democracy

But the rich rob the poor of their labour and invest it for profit

And because we are made of matter and mind doing that is against the logic of reality

that determines morality

He said I will spit on the sun -- its light will go out -- the world will be dark

They did not know that cities would be buried in their own ruins

Or that a railroad itinerary covered the continent to bring its cargo to the industrial site

to be killed

And grind human bones to dust

You wring your hands and stretch your throats

Cry spare the children and aged!

Fake morality! -- hypocrisy!

The world winces at your posturing!

War is sport

It is played to the laws of sport

It is obligatory to cheat

Kill or be killed

The tactics of death

The killing of young is a dividend of death

The killing of old a bonus of time

On heroes’ chests the medals rattle like the breathing of the dead

He said I have spat on the world

There is desert sand in the stone Sphinx’s eyes

The sphinx weeps

Democracy was the human mind’s greatest creation

You have destroyed it for bribes and profit

Capitalism is a war-god and a war-machine

The capitalist market is a battlefield

We are technological dinosaurs

We are fossils of death

Capitalism tears mind and matter apart and reverses the course of evolution and this has corrupted morality

Capitalism’s twisted doctrines camouflaged in ideology promote the fantasies of faith and protect

the creeds of terrorists

Could it have been other-wise?

If we had attacked two years earlier

I do not know

The road is long

There are many crossroads underpasses and bridges made from perished wood

Many covert corners where the actuaries and auditors hold office

I know only that the world will never again be at peace

EB 20 12 23

L'histoire d'un écrivain

Je suis né à 8 heures 30 le soir du mercredi 18 juillet 1934
Pendant un orage
Une heure avant d'entrer en travail ma mère frottait l'escalier de l'immeuble pour que la sage-femme trouve des marches propres
Dans le quartier où vivait ma mère le corps médical était considéré comme agent de l'autorité
J'ai été bombardé pour la première fois à cinq ans
Les bombardements ont continué jusqu'à ce que j'en aie onze
Plus tard l'armée m'a enseigné dix façons de tuer mon ennemi
Et la communauté m'a enseigné cent façons de tuer mon voisin
J'ai vu qu'il n'y avait pas de justice entre les différentes parties de la communauté
Une injustice est comme un galet lâché au centre de l'océan
Quand les rides atteignent les rivages elles sont devenues des raz de marée qui noient les villes
La nécessité règle nos jours selon la loi de la cause et de l'effet
Ceux qui gouvernent ne savent pas ce qu'est une personne
Et les gouvernés ne savent pas ce que devrait être un gouvernement
À la place les méchants font le mal et parce qu'il n'y a pas de justice les bons doivent faire le mal aussi
Comment peuvent-ils sinon gouverner la prison où ils vivent ?
J'arpentais les rues plein de rage
Je voulais que les pierres dans le cimetière militaire pleurent les morts sous elles
Je voulais que le crâne rêve de justice
Et puis je me suis souvenu du cerf-volant de fer qui vole dans l'esprit de l'enfant
Et j'ai vu les vieillards toucher leurs cheveux blancs aussi doucement qu'un moineau fait son nid sur le flanc d'un iceberg
Alors à vingt ans j'ai écrit une pièce
La loi d'écriture des pièces doit être la cause et l'utile
Pour casser la nécessité et montrer comment la justice est possible
Comme tous ceux qui vivaient au mitan de ce siècle ou qui sont nés plus tard
Je suis un citoyen d'Auschwitz et un citoyen d'Hiroshima
De ce lieu où les méchants ont fait le mal et de ce lieu où les bons ont fait le mal
Tant qu'il n'y a pas de justice il n'y a pas d'autres lieux sur terre : il n'y a que ces deux-là
Mais je suis aussi citoyen d'un monde juste encore à faire

1997, traduction de Jérôme Hankins et Séverine Magois
Texte repris dans le volume La Trame cachée, L'Arche, 2003.

Edward Bond, à propos de Sarah Kane :

« Notre théâtre ne donne à nos jeunes auteurs de théâtre aucune chance de se développer. Au lieu de cela, il crée un théâtre de symptômes. Quand BLASTED de Sarah Kane a été monté, les critiques l’ont attaqué avec la rage paniquée qui est le signe que finalement ils écrivaient sur quelque chose de profondément important. C’est la seule pièce contemporaine que j’aurais voulu écrire. C’est révolutionnaire. … 4.48 est sa « note de suicide » très personnelle... 4.48 est une grande pièce amèrement comique, pleine d’un désir de vie. C’est aussi un document sur notre temps. Lisez le - cette note de suicide est notre nécrologie. »

EDWARD BOND